Ski alpin – Le massif vosgien sevré de compétition : un hiver sans précédent depuis trente ans !

Depuis la fameuse saison 1989-90, le ski alpin n’avait pas connu cela dans le massif vosgien. Un hiver sans compétition faute de neige ! “On risque de le payer l’année prochaine” redoute Jean-Claude L’Epingle.

A 71 ans, avec presqu’autant d’années sur les skis, Jean-Claude L’Epingle fait partie des figures emblématiques des dirigeants du comité de ski du massif vosgien. Il en est le responsable du calendrier alpin depuis plus de 40 ans ! ”Quand j’ai hérité de la présidence de la commission alpine, j’ai également repris la gestion du calendrier depuis cette période avec une petite interruption de 6 à 7 ans, assurée par Michel Larchey”.

Mais à la fin de la présente  saison, c’est décidé, il passera le flambeau. Une décision murement réfléchie bien avant que le ski vosgien ne subisse de plein fouet cet hiver 2020 que le Belfortain qualifie sans détour de “catastrophique”. Près d’une centaine d’épreuves, des plus jeunes aux masters, devaient rythmer quatre mois de compétition, de décembre à fin mars. Elles ont toutes été reportées faute de suffisamment de matière première.

C’est seulement la deuxième fois que la discipline reine du ski est confrontée, depuis donc 40 ans, à l’absence totale de courses dans les Vosges. Un précédent que tous les moins de 35 ans n’ont d’ailleurs pas pu connaître. C’était durant l’hiver 1989-90. “On avait traversé une saison sans neige et sans la moindre course. Il avait fait froid mais nous n’avions pas les canons et avec le club, nous avions dû nous déplacer à Engelberg. La neige était arrivée en fin de saison, elle avait rapidement fondu et provoqué des inondations. Ensuite, la saison 1992-93 ne fut guère plus folichonne”.

C’est d’ailleurs à cette période que sont nées les Journées Françaises de Mellau, organisées en Autriche par les clubs colmariens durant le week-end de Pâques, pour meubler un tant soit peu le déficit de courses. Puis la coupe de France citadins et la coupe de la Fédération sont apparues qui ont permis, pour les familles qui le peuvent, d’envoyer régulièrement leur enfant en compétition dans les Alpes.

“Surtout, nous n’avons jamais connu ce yoyo des températures avec une quasi-absence de froid. Jusqu’à présent, le froid nous permettait de fabriquer de la neige quand elle manquait. Mais cette année, la pluie arrive à chaque fois derrière et détruit tout. Il nous manquait le froid pour conserver la neige”.  Si Jean-Claude L’Epingle ne parle pas forcément de dérèglement climatique, il redoute les répercussions potentielles sur la saison prochaine. “Tous les compétiteurs ont pris leur licence en décembre, les dirigeants aussi. En revanche, on va perdre ceux qui prenaient leur licence durant les vacances de février et en fin de saison. Cet hiver sans neige n’aura qu’un petit impact sur le nombre de licenciés. C’est la saison prochaine qu’on en payera les conséquences sauf si on a la chance d’avoir la neige en décembre. La perte de licenciés risque d’être sensible sur les secteurs urbains de Mulhouse, Colmar et Strasbourg où l’offre sportive est multiple. La première question des parents est toujours de savoir quand cela commence alors que, par exemple, leur enfant pourra aller faire de la patinoire durant toute l’année scolaire. ”.

Pendant que le ski nordique sauve relativement son calendrier, le ski alpin concentre cependant la majorité des licenciés avec près de 90 % du volume. Alors que le comité régional est tombé, pour la première fois, sous la barre des 10.000 licenciés en 2019, la chute risque donc de s’accélérer. “C’est essentiellement la masse qui souffre, elle n’a pas toujours les moyens nécessaires pour se déplacer en  stage. La vallée de Thann, la vallée de Munster et les Strasbourgeois, avec Dany Iselin, se sont organisés. Mais pour ce faire, il faut une structure et des parents qui mettent de l’argent”.

Les craintes de Jean-Claude L’Epingle sont d’autant plus vives que le ski alpin a justement pâti, lors de ces dernières saisons, d’une érosion de sa masse. “Tous ceux qui ne sont pas en mesure d’aller faire 30 à 40 jours de stage en été et en automne, ils arrêtent progressivement, surtout avec un hiver comme celui-ci. Les Journées Françaises de Mellau étaient avant tout un rendez-vous festif de fin de saison avec cette masse qu’on a perdue. C’est d’ailleurs pour cela, faute de clients, qu’elles ont été annulées l’an dernier”.

Et par expérience, Jean-Claude L’Epingle sait pertinemment que le mois de mars ne résoudra plus le problème. “De toutes manières, comment faire sans sous-couche ?” conclut mi-désabusé, mi-réaliste le vieux sage.

David Jeangeorges.